Paris, janvier 2009
Jean-Paul Duviols est professeur émérite de littérature et civilisation latino-américaine à Paris-IV. Outre ses nombreuses publications, il anime depuis vingt ans, tous les premiers jeudi du mois, les Tribunes des livres de la Maison de l’Amérique latine. Le public peut assister à ce rendez-vous littéraire au cours duquel sont présentés les derniers ouvrages latino-américains traduits en français ou portant sur l’Amérique latine.
Avant-propos des auteurs (Jean-Paul Duviols et Pedro Ureña-Rib)
Ce dictionnaire est destiné aux étudiants et aussi à un public plus large, à tous ceux qui veulent se familiariser avec la richesse culturelle des Caraïbes. Il ne s’agit pas de rivaliser avec les encyclopédies, les livres d’histoire ou de littérature, ni avec les guides touristiques, mais de proposer une approche essentielle d’un monde qui reste méconnu.
Les auteurs sont conscients qu’une telle entreprise comporte des choix qui supposent des lacunes, des oublis volontaires ou involontaires et que certaines rubriques mériteraient de plus longs développements.
En effet, rédigé dans le même esprit que les précédents dictionnaires (Espagne, Amérique latine, France), ce répertoire est une initiation qui ne saurait approfondir chaque sujet comme il le mérite, mais il a la prétention d’ouvrir des perspectives et de réunir pour la première fois des cultures qui ont déjà une longue histoire commune.
Les États membres de la Caraïbe sont : Antigua-et-Barbuda, les Bahamas, la Barbade, le Belize, la Colombie, le Costa Rica, Cuba, la Dominique, la Grenade, le Guatemala, le Guyana, Haïti, le Honduras, la Jamaïque, le Mexique, le Nicaragua, le Panama, la République dominicaine, Sainte-Lucie, Saint-Christophe et Nevis, Saint-Vincent et les Grenadines, le Salvador, le Surinam, Trinité-et-Tobago, le Venezuela.
Les membres associés : Aruba, la France (au titre de la Guyane, de la Guadeloupe et de la Martinique), les Antilles néerlandaises et les îles Turques et Caïques.
Nous avons ajouté à cette liste l’île de Porto Rico qui se trouve dans l’aire caraïbe.
Pour ce qui concerne le Mexique, la Colombie et le Venezuela, déjà traités pour l’essentiel dans le dictionnaire Amérique latine, nous avons considéré ces pays seulement en fonction de leur « façade » caraïbe. Nous renvoyons à ce même dictionnaire pour certaines entrées.
Trois siècles après Christophe Colomb, l’Amérique est toujours un « Nouveau » Monde, l’Indien un inconnu. Quand le baron Alexandre de Humboldt y débarque, en 1799, tout reste à faire : inventorier la faune et la flore, analyser les climats et la géologie, remonter les fleuves géants, gravir les cordillères, les volcans andins et les pyramides mexicaines... et s’élever enfin contre l’esclavage. C’est cette expédition - la première menée scientifiquement - qui apportera la gloire à Humboldt. Charles Minguet et Jean-Paul Duviols donnent au savant le plus complet de son siècle toute son actualité.
En 1552, le dominicain Las Casas publie à Séville la plus terrible des dénonciations des excès du colonialisme : la Très brève relation de la destruction des Indes. Les conquistadors y sont des diables qui pillent, tuent et allument des brasiers d’enfer. Cette apocalypse s’appuie sur une théologie rigoureuse du droit naturel : les Indiens, propriétaires légitimes de leurs terres, ont des droits de juste guerre contre les envahisseurs. L’humanité indienne, au lieu de constituer une chrétienté idéale est maintenant l’image du Christ bafoué. Las Casas s’inscrivait dans le courant minoritaire mais actif de ce qu’on a appelé la lutte espagnole pour la justice. Mais il ne pouvait se douter que les traductions de son pamphlet serviraient la cause de la légende noire anti-espagnole. La traduction que l’on publie est celle du protestant flamand Jacques de Migrodde, sous le titre manipulateur de Tyrannies et cruautés des Espagnols (1579). L’impact des très nombreuses rééditions fut amplifié par la diffusion des gravures de De Bry. Pour la première fois depuis des siècles, cette série capitale dans l’histoire de la guerre des images entre protestantisme et catholicisme, est rééditée intégralement avec le texte de Las Casas. Cette réédition fait pendant à celle du Théâtre des Cruautés, publiée simultanément dans la même collection.
Les images que reflète ce « Miroir du Nouveau Monde » témoignent autant des rêves que des réalités observées par les voyageurs européens.
De la Renaissance au siècle des Lumières, certains éclats de ce miroir montrent une humanité douce, innocente et esthétique qui a été à l’origine du mythe du « bon sauvage », d’autres, de féroces cannibales aux rituels inquiétants. Si certaines représentations sont superficielles, stéréotypées ou idéalisées, la plupart constituent de précieux documents ethnohistoriques.
Toutes ces images sont aussi révélatrices des mentalités et des projections de l’imaginaire de leurs créateurs.